Voici un film doux sur un sujet dur : l’exil de ceux qui viennent trimer en France pour soutenir leur entourage resté au pays. Algériens, Marocains, Maliens ou Sénégalais, comme le héros discret de cette chronique tout en finesse d’une existence morcelée. Amin, c’est lui, employé sur un continent, père et mari sur un autre. Philippe Faucon décrit ces deux vies avec la même humanité, en explore les manques et les rigueurs sans céder au mélo ou aux démonstrations faciles. D’un côté, il y a les chantiers, les contrats toujours aux marges de la légalité, le foyer de travailleurs où tous les coins du monde se croisent et se réchauffent. De l’autre, il y a les yeux adorateurs de trois enfants pour ce père intermittent, qui revient si rarement. Il y a aussi sa femme, qui n’en peut plus de l’attendre, d’être seule, et qui voudrait le rejoindre.
Jour après jour, voyage après voyage, Amin est le captif de son devoir, de ses responsabilités. Entre les différents espaces qu’il habite, il n’y a pas d’air, pas de liberté. Montrer avec une telle délicatesse cet aspect du quotidien d’un immigré vaut cent arguments de débat face à tous les discours nauséabonds d’aujourd’hui. Comme toujours, Philippe Faucon approche ses personnages avec un respect attentif, et ajoute un nouveau visage inoubliable à sa fresque de l’immigration et du déracinement. Télérama